Mon très cher Appart : tendre règlement de compte

Mon très cher Appart,

Voilà maintenant plus de 17 mois que nous vivons ensemble : un an et demi, tu imagines ? Tu représentes ma liberté, mon indépendance, ma fierté, mon cocon, mon havre de sécurité. Je me souviens encore de mon coup de foudre pour toi. C’était telle une évidence.

Ta position géographique si parfaite :  près d’un métro, près de la rocade, dans un quartier calme, près de mes amies, près de ma famille. Et avoir une ambiance campagnarde, avec les poules du voisin, en plein dans la ville : quel bonheur !
Ton agencement est idéal pour un petit T1: mezzanine, cuisine colorée dans le renfoncement de la pièce à vivre pour une belle séparation, une salle de bain bien optimisée…
Ta luminosité, où quand il fait beau je peux prendre de ton antre un véritable bain de soleil !

J’ai tellement de chance pour une première histoire. Mon premier “vrai appart” ( les logements étudiants Crous, ce n’est pas la même chose).

Oh tes anciens promis n’avaient pas vraiment pris soin de toi, tu te souviens? Il a fallu pas mal d’huile de coude, et de produits nettoyants, pour que tu reprennes tes couleurs à certains endroits. Pas étonnant que tu ais voulu tester ma fiabilité et ma fidélité. Car mine de rien tu m’auras bien mis à l’épreuve au début.

Tu as complètement pété les plombs !

Je crois que je me souviendrai toujours de cette fois où je me suis retrouvée brutalement dans le noir, sous ma douche. Couverte de savon. Pétage de plomb, littéralement. Oh tu as pris goût à cet effet de surprise. Le nombre de fois où l’électricité a sauté dans les moments les moins opportuns !
Bon crois-moi qu’au bout d’un moment, j’ai tout de même réussi à identifier la cause de ton saut d’humeur quotidien. Puissance trop basse du compteur.
Mais ils faisaient comment tes anciens locataires ? C’était des hommes de Cro-Magnon sans aucun petit électroménager ou quoi? Quand une simple bouilloire fait tout disjoncter, on se demande pourquoi les anciens n’ont pas réagi.

Là, tu m’as carrément refroidie …

Est-ce qu’on peut également évoquer ces douches express avec moins de 5 minutes d’eau chaude? Là, j’avoue, tu as touché dans le mille dans mes faiblesses. Transformer les moments cruciaux de détente dans ma journée en me balançant de l’eau glaciale … c’était sacrément osé ! Mais, je suis restée ( bon, j’avoue que je suis allée prendre mes douches “spéciales lavage de cheveux long” chez ma famille, qui heureusement n’habite pas loin. Qu’est ce qu’il faut pas faire sérieux ….). J’ai tenu bon et j’ai pris le problème en main, tout comme l’électricité. Bon cette fois, le verdict m’a plutôt “surprise” : le ballon d’eau chaude posé à l’horizontal au lieu de la vertical.
Encore une fois, laisses moi m’exclamer de nouveau mon cher Appart’ : mais que faisaient tes anciens locataires ???  C’était des hommes de Cro-Magnon sans hygiène ou quoi ?

Il y a les bonnes et les mauvaises blagues.

Et parce que jamais 2 sans 3, tu adores, encore aujourd’hui, faire craquer tes entrailles à m’en faire faire des bonds d’un mètre. Sincèrement, au début de notre vie commune, j’ai failli déguerpir d’urgence en pensant que tout allait s’effondrer. Avec le bois de tes poutres et de ton plafond qui émet un craquement aussi fort, oui, je t’assure, il y a de quoi s’inquiéter. Aujourd’hui, je continue de faire des bonds dans tes rugissements les plus forts, qui me prennent par surprise. Mais sinon, tu ne m’auras plus. Et toc. Ça fait (presque) ton charme ! (Héhé, tu t’y attendais à ça ?) En revanche, mes amies ne s’y font pas trop. Tu verrais leurs yeux de merlans frits à chaque fois…
Ça nous rend complice tous les deux, non ?

J’ai envie d’aller voir ailleurs, tu sais…

Tu sais, je ne te cache pas que je commence (très) sérieusement à avoir envie d’aller voir ailleurs tout de même. J’ai besoin de plus grand, j’ai besoin de plus adulte, j’ai besoin de plus de près avec mon lieu de travail. Surtout, pour être encore plus franche avec toi, j’ai besoin de changement et j’ai d’autres envies, très fortes, de projets de vie. Ça me rappelle ma relation avec mon ancien Smartphone. Le timing n’était pas le bon, et nous avons vécu encore heureux plusieurs mois. Pareil pour toi et moi mon petit appart. Il n’est pas encore temps de se séparer l’un de l’autre. Ça viendra, mais nous avons encore un peu de chemin à faire ensemble.

Je ne te conviens plus non plus, tu me le fais bien comprendre !

Je sens bien que toi aussi, tu as besoin de changement.
Tu t’es lié avec la machine à laver pour me faire galérer avec mon linge.
Tu as comploté avec la douche pour qu’un des bouts de sa porte tombe à tout va, me menaçant de créer une inondation. Vous êtes quand même sacrément complices tous les deux : son bac évacue de moins en moins l’eau. Je sais que tu sais que je n’ai pas de tournevis sous la main pour régler ça. D’ailleurs, dans cette salle d’eau, même le radiateur d’appoint prend un malin plaisir à souffler très chaud, puis froid, très chaud, puis froid et ainsi de suite.
Tu as engagé une grooosse araignée me donner des frissons de dégoûts.
Tu as carrément manigancé avec l’immeuble, ou le toit de l’immeuble, ou je ne sais quoi ou qui d’ailleurs, pour balancer de la mousse et de la terre sur ma voiture, ma bien-aimée, mon amie de toujours, chaque nuit.

On peut dire que tu es original dans tes coups fourrés… et sacrément fourbe.
Quoi que, quand je me souviens de mes voisins qui sont restés coincés pendant des heures dans leur chambre car leur porte était bloquée, et qu’ils ont du y aller à coups de scie (récupérée grâce à leurs proches par la fenêtre) pour sortir… je me dis que j’ai quand même de la chance.

Notre aventure continue encore un peu.

Avec toute ma tendresse et mon affection,

Ta locataire.